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Le fléminisme et la victoire du collant

written by Solène 14 mars 2020

Nous sommes à cette période de l’année que nous appelons mi-saison. On oscille entre l’été indien et les premiers signes de l’hiver. Les trenchs sont de sortie, les parapluies aussi mais les températures sont encore douces.

Nous sommes en pleine pression du collant. La pression du collant c’est de savoir quel est le moment opportun pour remettre des collants. Le jour où vous mettez un collant marque la fin de l’été. Pour vous mais pour les autres également. Aussi préparez-vous à recevoir des flots d’insultes en tout genre le jour où vous osez ressortir votre boîte à collants tandis que votre entourage n’y est pas préparé.

Je prends donc le risque et je l’assume : l’été est terminé. Ne me parlez pas d’été indien, 13 degrés ce n’est pas l’été indien !

Bref les collants sont de retours ! Et qui dit collant, dit laisser-aller sur l’épilation. Et oui. Ce n’est pas une légende urbaine, c’est un fait. L’épilation négligée à partir du mois d’octobre est connue comme le loup blanc. Je vous laisse imaginer l’état des lieux en hiver : c’est Bagdad sur nos mollets.

À la vue de l’incertitude constante de la météo actuelle, j’ai joué la prudence et je suis donc passée aux collants depuis une dizaine de jours. Et il m’est arrivé une anecdote qui m’a fait réfléchir. Il y a quelques jours, j’ai opté pour tenue toutefois confortable et efficace : un jean avec des bottines. Jusque-là, me direz-vous, rien d’exceptionnel.
Cependant je n’avais pas réalisé qu’une fois assise et mon jean légèrement relevé, la situation laisserait dévoiler quelques centimètres de peau au-dessus de la cheville. Et donc quelques poils qui essaient vainement de pointer leur tête en dehors de mon ourlet.

Malheureuse, qu’as-donc-tu-fait ! N’as-tu plus aucune estime de toi-même pour laisser apparaître ces poils que nous ne saurions voir (oui j’imite à la perfection l’homme réac’ et choqué) !

Le centimètre de peau apparent n’est pas passé inaperçu auprès d’un de mes amis qui m’a gentiment fait remarquer… que j’étais poilue. Non pas que ça lui importe (il est plutôt moderne, comme de nombreux hommes heureusement), mais il m’a posé une question assez légitime à savoir si c’était un acte féministe.

Question intéressante.

Je suis intimement convaincue que ne pas s’épiler ou se maquiller est un acte féministe en soi. Ou du moins la traduction d’une certaine façon de penser. Ces actions – si elles en sont – sont des exemples parfaits des injonctions qui pèsent sur les femmes et elles sont la représentation même des codes de la féminité qu’on nous impose.

Personnellement, puisque que je baigne dans le féminisme depuis pas mal de temps, j’ai pleinement conscience que lorsque je m’épile, je me plie à un système que je souhaite voir disparaître. Mais je pense aussi profondément que les codes de la beauté sont un véritable terrain de jeu. Ils nous permettent également de nous exprimer en silence.

L’habit ne fait pas le moine, mais pourtant ce que l’on choisit de porter, la façon dont on se maquille traduit assez distinctement la personne que nous sommes, ou du moins celle que nous souhaitons montrer aux autres. Par conséquent, nous pouvons tout à fait embrasser ces codes sans pour autant moins mériter ni notre liberté ni l’égalité que nous chérissons tant. L’avantage étant que nous faisons bien ce que nous voulons.

Parfois je ne me maquille pas, parce que je n’en ai pas envie. Parfois je ne m’épile pas, je ne me fais pas de brushing et laisse mes cheveux faire leur vie. Parfois je ne me mets pas de vernis, parfois j’enfile un jean et on voit mes poils qui dépassent.

Me concernant, j’aimerais sincèrement vous dire que c’est un acte de rébellion contre le patriarcat, j’aime à croire que des années de lecture féministe et de maturité m’ont amenée à choisir de ne pas me maquiller ou m’épiler par choix. Mais la vérité est toute autre, la vérité est moins glorieuse : j’ai souvent la flemme. Voilà, j’ai la flemme et si on vient me chercher des noises, je clame mon droit à l’égalité. Pratique.

Mais attendez un instant. Finalement – et jetez moi la première pierre si je me trompe- n’avez-vous jamais eu la flemme de vous maquiller pour aller juste chercher une baguette de pain, mais l’avez-vous quand même fait par peur des ‘qu’en dira-t-on’ ?
Dans cette logique et si je tire le fil de ma réflexion, si je décide d’embrasser ma flemme et de n’avoir que faire des remarques ou des regards… cela ne serait-il pas la traduction d’une victoire sur les injonctions faites aux femmes ?

Voilà, je suis fléministe.

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